La première gaffe en généalogie, c'est ce petit moment où vous êtes passé à l'acte, ce jour où vous avez écrit votre première lettre maladroite à une secrétaire de mairie, cette première visite aux archives départementales, ce premier pèlerinage sur les lieux de vie de vos ancêtres... On ne raconte pas souvent cette première gaffe Je trouve ça dommage car elle est riche d'enseignement. Vous avez surement commis des maladresses, des erreurs. Vous avez certainement rencontré des généalogistes plus aguerris qui vous ont mis sur la bonne voie. Si je commence, vous racontez vous aussi ?
Ma première gaffe était une lettre polycopiée où les maires d'une dizaines de communes était sommés de me donner sans délai (j'y avais droit, c'était sûr) la copie des actes d'état civil (moins de cent ans ou plus de cent, dans le désordre) de toute une liste de personnages tirés de mon arbre embryonnaire, avec des dates approximatives, cela va de soi. Avec ce mailing, j'ai eu un succès fou ! J'avais quand même mis une enveloppe timbrée pour la réponse. Tous mes correspondants sans exception m'ont renvoyé ma lettre que j'avais soigneusement rédigée à mon adresse, j'en étais soufflé. Leur réponse était seulement un peu décevante : j'ai systématiquement reçu mon courrier plié en quatre avec écrit dans la marge : nous ne faisons pas de recherches généalogiques !
Moralité : pas facile de se lancer seul tête baissée. Mieux vaut prendre conseil auprès de gens qui ont de l'expérience, cela fait gagner du temps et évite d'en faire perdre à d'autres... Et vous, je suis sûr que vous en avez commis de belles ?
Nos amis britanniques ne plaisantent pas avec la généalogie. Jugez vous même : une association anglaise recherche carrément les prétendants au trône d'Angleterre, si Guillaume de Conquérant n'avait pas envahi l'île en 1066 ! Oui, et pour cela, elle fait appel aux généalogistes. Mais, direz vous, il est occupé le trône d'Angleterre, il y a même toute une liste de successeurs à la très digne Elisabeth, à commencer par son fils Charles, son petit-fils William... Vous n'y êtes pas. Il s'agit de retrouver les descendants de l'obscur Edgar Aetheling, né vers 1051 qui fut le dernier roi d'Angleterre écarté par le duc Guillaume !
L'association English Heritage part de l'histoire : Edgar était le dernier descendant mâle de la maison royale du Wessex. Il fut désigné roi d'Angleterre par son grand-oncle Edouard le Confesseur. A la mort de ce dernier en 1066, il ne fut pas couronné, car considéré comme trop jeune.
Harold II lui fut préféré, mais il devait mourir peu après la bataille d'Hastings qui donna la victoire à Guillaume le Conquérant. Le jeune Edgar se soumit au vainqueur, mais ses droits ayant été usurpés, sa descendance, s'il en a eu une, a peut-être revendiqué le trône d'Angleterre. Une annonce demandant de se faire connaître est parue dans plusieurs journaux en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis, en Australie, en Allemagne et en Norvège.
Vous pouvez envoyer vos prétentions, assorties de preuves généalogiques à l'adresse Internet http://www.english-heritage.org.uk/server/show/nav.10807. Et surtout ne prenez pas trop au sérieux ce genre d'histoire dont sont surtout friands les généalogistes les plus crédules : aucune généalogie sérieuse ne peut remonter aussi loin, à part peut-être celle de la reine d'Angleterre déjà détentrice de ce trône tant convoité !
Avez-vous des ancêtres nobles ? Probablement ! Comme 90% des français, vous descendez sans doute d'un roi, Saint-Louis, Hugues Capet, Charlemagne ou un autre. Comment est-ce possible ? Tout simplement à cause du taux d'implexe. Le taux d'implexe, c'est le rapport entre le nombre d'ancêtres théoriques et le nombre d'ancêtres réels que nous avons. Par exemple, au lieu d'avoir 1023 ancêtres à la 10e génération, le roi d'Espagne Alphonse XIII avait seulement 111 aïeux, tellement la consanguinité était forte.
En fait, nous avons beaucoup moins d'ancêtres que nous
pouvons le penser. Théoriquement, nous avons tous 2 parents, 4 grands-parents, 8
arrières grands-parents, et ainsi de suite. Mais le calcul s'avère absurde
lorsque l'on remonte loin dans le temps. Si l'on estime à 45 le nombre de
générations nous séparant de Charlemagne (747-814), chaque Français
d'aujourd'hui aurait 16.000 milliards d'ancêtres théoriques, tous contemporains
de l'empereur ! Imaginez de multiplier ce chiffre par le nombre de français actuellement, soit 16000 milliards x 60 millions ! C'est évidemment impossible, les historiens estiment à environ
8 millions la population française de cette époque. Cela veut dire que notre sang s'est mélangé, génération après génération, avec celui d'un cousin ou d'une cousine.
Mais si nous avons si peu d'ancêtres réels, comment pouvons nous tous descendre d'un roi ? C'est un calcul statistique, pas autre chose. Il nous permet de supposer que la population vivant sur notre sol au temps de Saint-Louis (par exemple, mais cela peut-être Charlemagne) étant très faible par rapport à notre nombre d'ancêtres théoriques, nous descendons forcément de tous les habitants vivant à cette même époque. Statistiquement, cela tient la route. Mais encore faut-il le prouver généalogiquement.
Et bien l'expérience de généalogistes chevronnés montre que de fil en aiguille, de grand-mère en aïeul au 8e degré et en explorant une à une les branches de notre arbre, nous pouvons tous nous trouver un ancêtre noble. Certes, le premier de la liste sera sans doute de bien modeste condition, petit seigneur proche de ses "gens" et de sa terre. Mais en remontant son arbre généalogique, les liens de parentés vont logiquement mener à une noblesse plus éclatante, et le modeste écuyer sera bien probablement le rejeton d'une lignée plus prestigieuse proche de la Cour, dont on sait qu'elle mène inexorablement à un roi...
Oui, vous avez de bonnes chances de trouver un peu de sang bleu dans vos veines de généalogiste. Mais pas d'emballement. Avant de tomber sur "le filon noble", vous explorerez des dizaines de branches composées d'humbles cultivateurs. Sachant qu'une bonne généalogie repose sur une recherche rigoureuse, démarrant de soi même et qu'elle s'étaye d'acte en acte, gardez patience. Saviez vous qu'un seul généalogiste a réussi à retrouver la totalité de ses 1023 ancêtres sur dix générations ? Et la morale de cette histoire ? Laissons la à La Bruyère, il déclarait que tout homme descend d'un roi et d'un pendu !
J'en vois déjà qui sourient à cette question naïve. Mais elle mérite d'être posée. Car depuis l'invasion des logiciels et des sites Internet dans cette bonne vieille discipline, jamais l'arbre n'a eu aussi peu d'utilité ! Regardez celui-ci.
Il est plus là pour nous faire réfléchir à la vanité des hommes et au devenir de leurs âmes que pour représenter une ascendance aussi illustre soit-elle !
Non, un arbre généalogique aujourd'hui, c'est un truc très technique. Ouvrez Généatique, Heredis, Parentèle et voyez comment les généalogistes naviguent. De case en case, de clic en clic ! Et sur Internet, allez voir la base roglo ou la base "pierfit" (sur Geneanet), avec respectivement 1.729.000 et 893.000 ancêtres en ligne. C'est ahurissant de faire autant de liens entre les personnes.
Et bien je suis partagé. J'ai été parmi les premiers à essayer de décrire les logiciels et les sites Internet de généalogie (oui, je fais ça depuis 1997).
Mais quand j'étale sur la table l'arbre dépliable en huit volets, offert par Francis Christian, l'éditeur de Généalogie Magazine, je reviens à une certaine réalité. Oui, ces 8 feuilles format A4 tenues par un bout de scotch (non, c'est un papier rouleau) donnent à réfléchir. Ma base de données sur GeneaNet contient aujourd'hui plus de 5.684 personnes. Ce bout de papier imprimé ne permet d'en afficher que 1023. Pas plus de 10 générations. Et pourtant, il est loin d'être rempli ! Il y en a des petites cases sans nom. Et moi, tout fier de mes 5.600 aïeux, je remonte parfois à l'an 1200, mais je ne connais pas plus de 400 de mes 1023 premiers ancêtres...
Alors je dis : stop à la course aux ancêtres, il faut revenir à l'arbre dépliable ! Prendre le temps de retracer ces destinées ignorées. Mettre sur les noms, des faits, des liens, des lieux. Pour comprendre que nous sommes issus d'un mélange ahurissant de gens dont certains, s'ils se sont croisés, ne se sont sans doute jamais adressé la parole. C'est cette diversité là, la généalogie.
Un truc ringard, du bruit, de la foule et au final pas grand chose ? Erreur ! Un salon généalogique c'est au contraire une occasion unique de rencontrer d'autres généalogistes, d'aller poser ses questions aux associations faisant des recherches sur son terroir d'origine. Et aussi, disons le tout net, d'accéder gratuitement aux bases de données d'ancêtres. Car lors des salons de généalogie, les associations viennent avec leurs cd-rom de données dans leurs bagages. Il suffit de demander si votre arrière-grand-père n'y figure pas et peut-être aurez vous la surprise de remonter d'un coup de cinq générations. Voici un petit montage sans commentaires pour voir ce qui se passait samedi 18 novembre 2006 vers 15 heures à la Garenne Colombes. Tranches de vies...
Le commentaire de Stéphane sur l'entraide en généalogie amène naturellement un débat récurrent chez les généalogistes. C'est celui du gratuit contre le payant, des amateurs contre les professionnels, des bénévoles contre les "marchands d'actes"... Comme s'il n'y avait pas de place pour tout le monde ! Cette problématique me fait penser à l'histoire de la poule qui a pondu l'oeuf ou l'oeuf qui a généré la poule. Un bon exemple avec les relevés d'actes effectués par les associations. Sans les bénévoles qui les ont effectués un à un, passant des heures à dépouiller des registres anciens, il est bien évident que ces bases de données n'existeraient pas. Mais sans une certaine société qui les commercialise depuis plus de dix ans, d'abord par le Minitel, ensuite par Internet, ces actes ne seraient certainement pas diffusés à une telle échelle. Laurent Fordant et sa société SWIC pour les citer nommément participent évidemment au développement de la généalogie en France. Pour moi, il ne sert donc à rien d'opposer le gratuit au payant. Je souhaite une seule chose, que les deux se développent harmonieusement, en toute complémentarité. Mais j'aurais l'occasion de reparler des sites gratuits et des sites payants... Qu'en pensez vous ?
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